AFRIQUE-FRANCE : à l’ombre du sommet de Bamako

Bien entendu, l’adieu de François Hollande et quelques propos élogieux que certains de ses homologues africains ont eus à son endroit. L’affluence qui fait que plus de 30 chefs d’Etats et de gouvernements ont répondu à l’appel de la France. Mais aussi la participation symbolique et plutôt inédite d’Adama Barrow à la rencontre. Pour le reste, les thématiques les plus pertinentes et touchant de près les défis du continent africain, ont été abordées en l’abri des caméras et des objectifs. Il en est ainsi du plaidoyer de haut niveau de la jeunesse africaine en faveur de la capture du dividende démographique, un concept qui voit en cette jeunesse un formidable moteur de croissance et de développement, sous réserve d’un certain nombre de conditions.

Le développement, en marge du sommet

Le 27ème sommet Afrique-France ne déroge pas à la règle. Les problématiques les plus pertinentes ne sont pas nécessairement celles dont les chefs d’Etat, en boubous amidonnés ou costumes-cravates, ont parlé devant les médias. Ce ne sont pas non plus les bouts de phrases et les déclarations-chocs destinés à mettre en évidence l’entente entre tel ou tel chef de l’Etat ou susurrant une brouille en perspective. Loin de tout le bruit et de la clameur médiatique, on a parlé du développement du continent africain, avec à l’appui des faits et des indicateurs précis. En effet, prenant de plus en plus conscience des risques liés à l’abandon de la jeunesse africaine, mais aussi du potentiel de croissance et de développement dont celle-ci est porteuse, les Etats africains, à travers leurs ministres de la jeunesse, ont formulé un plaidoyer en faveur de la capture du dividende démographique. Une capture qui, eu égard aux défis en la matière, requiert un engagement ferme et une vision claire du leadership continental au plus haut niveau, mais aussi un accompagnement diligent des partenaires dont la France.

Un tableau sombre

De fait, pour un cas comme celui de la Guinée, le potentiel en capital humain est d’autant plus grand que des 10.500.000 habitants, 85 % ont moins de 45 ans. Mais entre le potentiel et le gain espéré, le fossé est béant et suppose d’être comblé par volontarisme affirmé des autorités. Car les chiffres actuels indiquent que 60 % des jeunes de moins de 25 ans végètent dans le chômage. Le taux de mortalité maternelle et infantile, quant à lui, se situe à hauteur de 55,24 pour 1000 naissances vivantes. Le taux de scolarisation, pour sa part, s’il paraît reluisant, il se trouve que seulement 35 % des élèves guinéens achèvent le cycle secondaire. Un chiffre qui tombe à 28 % en ce qui concerne les filles. Ce qui pourrait s’expliquer en partie par le taux de prévalence du mariage précoce, se situant à 70 %. Autant de raisons qui justifient que 55,2 % des Guinéens soient catalogués comme pauvres et qui, généralisées à la dimension du continent, expliquent la tendance très marquée de l’émigration clandestine et la rapide progression du péril terroriste au sein de la couche juvénile.

Que faire ?

Pour inverser cette tendance sombre, des mesures hardies sont nécessaires. Entre autres, il s’agit de créer pour la jeunesse les conditions de sa formation, de lui procurer la santé et procéder à des réformes économiques qui permettent son employabilité. Mais il s’agit aussi d’agir sur la forte natalité du continent via les procédés de planification familiale en vue de faire émerger une proportion de population active plus importante que les franges dépendantes que sont les enfants et les personnes âgées. Pour revenir au cas de la Guinée, des projections estiment qu’à l’horizon 2050, avec le taux de fécondité actuel (5.1 enfants par femme), le pays sera habité par plus de 33 millions d’âmes. Un chiffre qui sous-tend des défis que l’on peut aisément deviner.

Boubacar Sanso Barry

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