Les Premières dames d’Afrique ont décidé de faire de la lutte contre la mortalité maternelle et néonatale une priorité de leur action de santé publique. Cette action passe par un renforcement du réseau médical africain, encore trop disparate. Cependant, cette action ne connaîtra qu’un succès sans mesures éducatives sur les facteurs de risque en rapport avec les coutumes, les traditions et le mode de vie rural.
La baisse significative du nombre de décès infantiles ces 20 dernières années dans le monde est l’une des réussites les plus spectaculaires et les plus encourageantes de la santé publique internationale. Ainsi, entre 1990 et 2015, la mortalité maternelle dans le monde a diminué de 44 %. L’impact sur la mortalité infantile de cette dynamique est considérable : en moyenne le risque de mourir en bas âge est multiplié par cinq pour les enfants qui ont perdu leur mère. Les défis de la santé maternelle et de la santé infantile sont donc étroitement liés. Cependant, malgré des progrès importants, de trop grosses disparités demeurent d’un pays à l’autre, et plus généralement d’un continent à l’autre. Ainsi, le risque de décès maternel est de 1 sur 180 dans les pays en développement, comparé à 1 sur 4 900 dans les pays développés – soit un taux 23 fois plus élevé.
Dominique Nouvian : « L’avenir de l’humanité se joue en Afrique »
Aujourd’hui, seuls 62 pays ont rempli l’Objectif du millénaire pour le développement (OMD) numéro quatre : réduire de deux tiers la mortalité des enfants de moins de cinq ans par rapport au niveau de 1990. Un demi-échec, donc. Et ce en particulier en Afrique subsaharienne – le continent a comptabilisé à lui seul près de trois millions de décès juvéniles en 2015, soit la moitié de ceux-ci. Une réalité particulièrement alarmante quand on connait les tendances démographiques mondiales actuelles. « L’avenir de l’humanité se joue en Afrique », soulignait Dominique Nouvian, Première Dame de Côte d’Ivoire, et présidente de la Fondation Children of Africa.
« Notre continent est en effet la variable clef de la dynamique démographique mondiale, tous les experts s’accordent à le dire », poursuit la première dame ivoirienne. « Selon les projections de l’ONU, la population africaine passera de 1,2 milliard aujourd’hui (15 % de la population mondiale) à 2,5 milliards en 2050 (un quart de la population de la planète). » Ce dynamisme est une bénédiction pour l’Afrique, à condition que la nouvelle génération soit prise en charge. Selon le rapport Génération 2030/Afrique, réalisé par l’Unicef en 2014, « d’ici 2050, environ 40 % des naissances mondiales se produiront en Afrique et 40 % de la totalité des enfants se trouveront sur notre continent (…) Si l’investissement dans les enfants africains ne reçoit pas la priorité, le continent ne sera pas capable de profiter intégralement de sa transition démographique dans les décennies à venir. Sans des politiques équitables et favorisant l’intégration, le rythme de croissance de la population pourrait nuire aux tentatives d’élimination de la pauvreté et augmenter les disparités ».
Les Premières Dames d’Afrique se mobilisent ensemble
Dominique Nouvian s’investit depuis quelques années aux côtés des ministères en charge de la santé des différents pays afin d’amélioration de l’état de santé des populations en général et de celle des groupes vulnérables en particulier. Mais elle n’est pas seule : nombre de Premières Dames du continent ont lancé une action conjointe afin de mobiliser et regrouper les efforts afin de soutenir toutes les initiatives prises pour réduire la mortalité maternelle et infantile. Plusieurs épouses de dirigeants africains francophones se sont regroupées à Antananarivo (Madagascar) en novembre dernier, afin de participer à une rencontre sur la santé de la mère et de l’enfant en Afrique. Elles y ont encouragé la mobilisation et le renforcement de la mise en œuvre de la stratégie mondiale de la secrétaire générale de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) en faveur de la santé maternelle, des nouveau-nés et des enfants.
Durant cette rencontre, Madame Sika Kabore, première dame du Burkina, rappelait que « cette forte mortalité touche plus particulièrement les femmes et les nouveau-nés du milieu rural ». Ce sont spécifiquement dans ces zones qu’on observe la plus grande pénurie de professionnels de la santé, un manque d’équipements et d’infrastructures, ainsi que d’un accès inadéquat aux outils de prévention et de traitement de base. En conséquence, 50 % des femmes en Afrique accouchent encore chez elle. Les nouvelles mères qui survivent, n’ont ensuite pas accès à des soins de qualité pour leurs enfants. Afin de renforcer le système de santé, le monde a actuellement besoin de 4 millions de nouveaux travailleurs de la santé (notamment des sages-femmes et des agents communautaires), principalement dans les zones reculées d’Afrique. L’accès aux soins qualifiés pendant la grossesse et l’accouchement, aux soins obstétricaux d’urgence et aux soins postnataux immédiats pourraient empêcher jusqu’à 80 % des décès maternels. Ils ont déjà contribué à diminuer de 44 % le nombre annuel de décès maternels depuis 1990.