Selon Mabingue Ngom, du Fonds des Nations unies pour la population, des germes de changement démographique existent sur le continent.
Mabingue Ngom est directeur du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre depuis quatre ans. Il analyse la situation dans les 23 pays que couvre sa direction.
Quelles tendances démographiques observez-vous sur le continent africain ?
Mabingue Ngom L’Afrique est à la traîne vis-à-vis de la transition démographique. C’est regrettable, car les forts taux de fécondité en Afrique subsaharienne sont un facteur de fragilisation des Etats. Tant que le taux de croissance de la région ouest et centre restera de 2,7 % par an alors qu’il est de 1,2 % au niveau mondial, elle ne pourra pas dégager une épargne lui permettant d’investir. Les Etats ne pourront pas bénéficier du « dividende démographique » avec moins d’enfants et plus d’adultes au travail.
Dans les années 1950, d’autres pays présentant des niveaux de développement similaires avaient des naissances nombreuses : 6,57 en Afrique subsaharienne, 7,3 au Niger, 7,28 en Algérie, 6,65 en Tunisie, 6 en Corée du Sud. Ils sont très éloignés les uns des autres aujourd’hui. Plusieurs éléments expliquent ces trajectoires différentes. Les faibles progrès de la médecine et de l’hygiène qui ont maintenu très longtemps une mortalité infantile à des niveaux particulièrement élevés dans la zone subsaharienne, ce qui a poussé les couples à avoir beaucoup d’enfants pour tenir compte de ce risque ; le manque d’accès à une planification familiale proposant des méthodes modernes de contraception ; et enfin, les pesanteurs sociales et culturelles, favorables aux mariages précoces.