Pour les bébés africains, des premières années semées d’embûches

Pour les bébés africains, des premières années semées d’embûches

Le Monde Afrique

L’Afrique au défi de la santé infantile. Alors qu’un enfant subsaharien sur treize meurt avant l’âge de 5 ans, « Le Monde Afrique » restitue les actions menées pour améliorer la condition des tout-petits.

 

Alors qu’en Afrique, continent le plus jeune de la planète, les moins de 15 ans dépasseront le milliard d’ici à 2055, quel statut y réserve-t-on aux bébés et aux jeunes enfants ? Si l’on est loin de « l’enfant roi » des pays du Nord – où le niveau de vie et la faible natalité en ont fait un petit être choyé et surprotégé –, la place symbolique des enfants africains est doucement en train de s’élargir : de moins en moins simples numéros dans une fratrie, ils sont de plus en plus considérés comme des êtres sociaux en devenir, des individus à part entière, à mesure que s’installent les prémices d’une transition démographique. Un processus lent, comme le rappelle l’anthropologue Yannick Jaffré, qui travaille depuis des années sur l’Afrique de l’Ouest : « La démographie bouge, certes, mais assez doucement pour que la femme ait encore besoin d’être mère pour acquérir un statut social. »

Le chemin à parcourir est encore long. Et pour l’heure, l’urgence pour de nombreux bébés subsahariens reste d’abord d’échapper à une mort précoce : en 2018, dans cette zone, un enfant sur treize est décédé avant son cinquième anniversaire – soit un taux de mortalité quinze fois plus élevé qu’en Europe, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Si les décès avant 5 ans ont diminué de 58 % sur la planète entre 1990 et 2017, l’Afrique concentrait encore plus de la moitié des 5,4 millions de morts juvéniles en 2017.

Améliorer l’espérance de vie sur ce continent, c’est donc commencer par s’occuper de la toute petite enfance, puisque sur dix décès avant 15 ans, huit ont lieu avant l’âge de 5 ans et que sur ces huit morts, la moitié intervient même au cours du premier mois de vie. Pour avoir des chances d’atteindre l’âge adulte, un nouveau-né doit éviter la prématurité (11 % des décès), les infections des suites d’accouchement (11 %), les infections respiratoires (danger le plus immédiat qui cause 14 % des décès du premier mois), la malaria (10 %), les diarrhées (6 %)…

Scolarisation accrue

Le Fonds français Muskoka (partenaire du Monde Afrique), qui intervient dans huit pays africains (Sénégal, Côte d’Ivoire, Bénin, Togo, Tchad, Mali, Guinée et Niger), tente de relever ce défi en multipliant et en diversifiant les actions qui permettent d’améliorer la condition des tout-petits. Ce fonds, qui s’appuie entre autres sur l’Unicef et l’ONU-Femmes, travaille à la popularisation de la méthode « kangourou », à la surveillance de l’hypothermie des prématurés par un bracelet électronique, à la mise en place d’une boucle WhatsApp entre médecins pour discuter des cas les plus difficiles dans les villages inaccessibles…

L’Afrique de l’Ouest bruisse d’expériences où les cultures traditionnelles se marient à une approche plus aseptisée et quasi mondialisée de la petite enfance, dans laquelle la médecine devient centrale. Il y a urgence, car sans ces efforts tous azimuts, 31 millions d’enfants africains sont statistiquement condamnés, d’ici à 2030, à mourir sans avoir soufflé leurs cinq bougies.

Des chiffres qui font peur mais masquent des évolutions. Car peu à peu, des batailles sont gagnées et le statut des enfants africains change. A la faveur de l’urbanisation, qui va de pair avec une scolarisation accrue et un accès à la télévision, ils se font une place dans la société et donc dans leur propre famille. « La première marque de ce changement peut se lire dans l’application accrue des familles à choisir un prénom pour leur enfant, quand hier il pouvait être baptisé par le marabout ou prendre le nom que le calendrier proposait le jour de sa naissance », observe Yannick Jaffré.

Un puissant mouvement est à l’œuvre en Afrique de l’Ouest, qui ébranle par ricochets tous les équilibres sociaux, y compris la place des vieillards, hier plus proches des jeunes générations et aujourd’hui coupés d’eux par l’école. « Monsieur » et « Madame » bébé sont en train de s’imposer, reste à les accompagner en luttant efficacement contre la mortalité périnatale ou infantile.

voir l’article

Paludisme en Afrique : les femmes et les enfants d’abord

Paludisme en Afrique : les femmes et les enfants d’abord

Le Monde Afrique

Face au ralentissement de la lutte contre la maladie parasitaire, le rapport 2019 de l’OMS met l’accent sur les populations fragiles et isolées.

 

Les femmes et les enfants d’abord : c’est le message fort que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a décidé de mettre en avant, particulièrement pour l’Afrique, dans son rapport 2019 sur la lutte contre le paludisme, rendu public mercredi 4 décembre. Braquer les projecteurs sur le continent est une nécessité puisqu’il continue de porter le plus lourd fardeau de cette maladie mortelle, avec 93 % de tous les cas dans le monde. En 2018, ce sont 228 millions de personnes qui ont contracté la maladie parasitaire véhiculée par le moustique anophèle et 405 000 en sont mortes. Près de sept victimes du parasite sur dix ont moins de 5 ans.

Les femmes enceintes sont particulièrement vulnérables. En 2018, 11 millions d’entre elles, vivant dans 38 pays du continent, ont été contaminées, ce qui équivaut à près d’un tiers de toutes les grossesses africaines. Mais la même année, seulement 31 % des femmes enceintes vivant dans des zones à risque ont reçu les trois doses de traitement préventif recommandées par l’OMS. Les conséquences d’une infection par le parasite Plasmodium falciparum sont importantes pour les mères mais aussi pour les enfants qu’elles portent, puisqu’ils naîtront avec un poids trop faible. Moins gros, ils sont davantage exposés à venir au monde prématurément et donc à mourir dans les premiers mois de vie. L’OMS a estimé que 872 000 enfants du continent sont ainsi nés en insuffisance pondérale.

Par ailleurs, sur les 24 millions d’enfants infectés et âgés de moins de 5 ans, en Afrique subsaharienne, la moitié souffrait d’une anémie modérée et 1,8 million d’une anémie sévère, facteur de risque majeur de mortalité infantile. « Le paludisme continue d’être une maladie de la pauvreté et de l’inégalité », explique le Guinéen Abdourahmane Diallo, directeur général du partenariat Roll Back Malaria pour en finir avec le paludisme : « Les femmes et les enfants étant les populations les plus vulnérables, il est important de mettre l’accent sur cet enjeu, même s’il n’est pas nouveau. »

Couverture santé universelle

L’agence onusienne insiste d’autant plus sur cette priorité que les outils de prévention, de diagnostic et de soin existent et ont fait leurs preuves. Pour atteindre ces femmes et ces enfants parfois isolés, la clé de la lutte « repose sur la construction de systèmes de santé communautaires robustes et, surtout, sur la création ou le renforcement d’une couverture santé universelle », détaille le docteur Diallo. Une prise en charge globale et minimale des femmes durant leur grossesse leur permet en effet d’accéder à la prévention du paludisme, d’être diagnostiquées et, le cas échéant, soignées. Ce suivi de base est également essentiel pour les enfants après l’accouchement, d’autant plus si la mère a été infectée.

C’est d’autant plus urgent que, en 2018, plus d’un tiers des enfants ayant développé une fièvre (36 %) en Afrique subsaharienne, donc susceptibles d’avoir été infectés par le paludisme, n’ont eu accès à aucun soin. « Les agents communautaires sont les mieux à même de délivrer une bonne information et de faire une prévention efficace, rappelle le docteur Diallo. Ne serait-ce qu’en distribuant des moustiquaires imprégnées d’insecticide », qui restent encore le moyen le plus efficace pour se protéger de l’anophèle. Désormais, 61 % des enfants qui vivent dans une zone « impaludée » dorment sous une moustiquaire, contre 26 % en 2010.

Six pays africains concentrent plus de la moitié des personnes atteintes du paludisme : le Nigeria, qui compte à lui tout seul un quart d’entre eux ; la République démocratique du Congo (RDC, 12 %) ; l’Ouganda (5 %) ; la Côte d’Ivoire, le Mozambique et le Niger (4 % chacun). Et seulement sept pays du continent ont réussi à vaincre la maladie : l’île Maurice, le Maroc, le Lesotho, les Seychelles, la Tunisie et l’Egypte, auxquels l’Algérie vient tout juste de se joindre puisqu’elle n’a enregistré aucun cas en 2018. Enfin, le Cap-Vert, l’Eswatini et le Botswana pourront bientôt être déclarés « libres de tout paludisme » (respectivement 2, 59 et 533 cas), tandis que l’Afrique du Sud, qui vient de passer sous la barre symbolique de 10 000 cas, est aujourd’hui sur la voie de l’éradication, selon le rapport.

Analyse fine des données

Même si la bataille est loin d’être gagnée, le rapport prend le temps de faire le bilan de quinze années de lutte (2000-2015) et rappelle que les « progrès ont été considérables ». L’OMS estime par exemple que, depuis 2000, au moins 93 millions de cas de paludisme ont été évités et que 590 000 vies ont été épargnées. Grâce à la disponibilité accrue de tests peu chers et de bonne qualité, le pourcentage d’enfants diagnostiqués a fait un véritable bond en avant, passant entre 2015 et 2018 de 48 % à 76 %. Sur la même période, l’investissement dans la recherche fondamentale et le développement de produits est en hausse et a atteint 598,2 millions d’euros en 2018, frôlant le record de 2009 qui s’était élevé à 610 millions d’euros.

Cependant, ces bons chiffres ne doivent pas faire oublier que le ralentissement dans la lutte se confirme. Il est presque certain que les Objectifs de développement durable adoptés par les Nations unies, qui visent à éradiquer le fléau d’ici à 2030, ne seront pas atteints. Le nombre de nouveaux cas observés chaque année, après une chute spectaculaire en 2014, stagne depuis. L’argent fait aussi défaut, estime l’auteur principal du rapport, le Kényan Abdisalan Noor, puisqu’il faudrait quasiment doubler les moyens actuels, qui s’élèvent à 2,44 milliards d’euros, pour en finir avec la maladie. Ainsi, « malgré la récente reconstitution du Fonds mondial [contre le sida, la tuberculose et le paludisme], la plus importante de toute son histoire, nous risquons d’être seulement capables de préserver les progrès accomplis, avertit le docteur Noor. Ce manque de financement est la plus grande menace qui pèse sur la lutte. »

Pourtant, une région dans le monde – l’Asie du Sud-Est – a prouvé qu’une volonté politique forte pouvait permettre de venir quasiment à bout de la maladie en quelques années. Un résultat obtenu notamment grâce à une analyse fine des données de terrain, qui permettent l’utilisation la plus ajustée des moyens disponibles. Le Cambodge, la Chine (province du Yunnan), le Laos, la Birmanie, la Thaïlande et le Vietnam sont ainsi parvenus, entre 2010 et 2018, à faire chuter le nombre de nouveaux cas de 76 % et les décès de 95 %. En 2018, le Cambodge n’a même enregistré aucun cas de décès lié à la maladie pour la première fois de son histoire.

voir l’article

Capture du Dividende Démographique en Afrique de l’ouest et du centre et projets porteurs : SWEDD et MUSKOKA

Capture du Dividende Démographique en Afrique de l’ouest et du centre et projets porteurs : SWEDD et MUSKOKA

Jeune Afrique

25 ans après la Conférence du Caire sur la Population et le Développement, alors que des progrès significatifs sont réalisés dans les autres régions du monde, l’Afrique de l’Ouest et du Centre semble être la plus laissée en rade.

Dans un grand nombre de pays, les efforts de croissance économique observés au cours des deux dernières décennies, qui se sont traduits par des taux de croissance économique de l’ordre de 5% par an, sont anéantis par le croît démographique (de l’ordre de 2,7%) qui accentue la pauvreté en amenuisant les revenus par habitant.

Au cours de ces cinq dernières années, le Fonds des Nations pour la population a montré son leadership dans la conduite du dialogue politique et la communication autour du dividende démographique afin d’accélérer la mise en œuvre du programme d’action du Caire. En effet, le dividende démographique fait référence à une accélération de la croissance économique qui survient dans un pays lorsque la proportion de la population active est supérieure à celle des personnes n’étant pas ou plus en âge de travailler. 

Sa réalisation repose sur des investissements conséquents en faveur de l’autonomisation des femmes et des jeunes, notamment dans les domaines de l’éducation, de la santé de la reproduction, y compris la planification, et de la création d’emplois pour les personnes productives. Le dividende démographique a également un lien étroit avec les nouveaux agendas de développement de la communauté internationale, notamment l’agenda 2030 pour la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD), celui de l’Afrique que nous voulons en 2063 ainsi que le programme d’action de la CIPD.

Des partenariats stratégiques pour résoudre les problématiques de développement

Le mouvement autour du Projet SWEDD fait des émules

Le Projet d’Autonomisation des Femmes et Dividende Démographique au Sahel (SWEDD) fait partie des initiatives réussies qui méritent d’être portées à l’échelle continentale. Il s’agit d’un projet régional multisectoriel regroupant sept pays de l’Afrique de l’Ouest et du Centre dont  le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad, qui y ont investi pour la plupart des ressources propres, en plus du financement de la Banque mondiale, et dont le budget global s’élève à 295 millions USD.

Les bénéficiaires primaires de ce projet sont les adolescentes de 10 à 19 ans. Les activités mises en œuvre dans le cadre du projet SWEDD visent à renforcer les compétences de vie et les connaissances en matière de santé sexuelle et reproductive, le maintien des filles à l’école; et élargir les possibilités économiques afin de permettre aux filles et aux femmes d’exercer des métiers mieux rémunérés.

La théorie du changement du projet SWEDD est un pilier clé pour soutenir la transition démographique dans la région d’ici 2023. Dans la perspective d’étendre ce projet à l’échelle continentale conformément à une des recommandations des gouvernements lors de la revue de la déclaration d’Addis Abela en octobre 2018 à Accra, les demandes d’adhésion de cinq autres pays sont à l’étude par la Banque mondiale. Il s’agit du Sénégal, du Togo, de la Gambie, de la Guinée et du Cameroun.

L’UNFPA joue un rôle de premier plan dans la coordination régionale du projet, en collaboration avec l’Organisation Ouest-Africaine de la Santé, et forme des partenariats stratégiques avec plusieurs organismes techniques spécialisés ainsi que le secteur privé avec l’appui de GBCHealth.  Une conversation avec l’Agence Française de Développement a été initiée afin de synchroniser les efforts et rendre les investissements plus efficaces.

Partenariat catalytique, Muskoka : la confiance renouvelée

Un autre exemple d’initiative réussie en lien avec le Dividende démographique, est le Fonds français Muskoka (FFM), créé en 2010 par la France, qui permet à quatre agences des Nations unies, l’UNFPA, l’OMS, ONU-Femmes et l’UNICEF dans huit pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre de mutualiser leur expertise technique pour mener des interventions à haut impact en matière de santé maternelle, néonatale, infantile et des adolescents.

L’initiative a fait ses preuves notamment en faveur des adolescents sous la direction de l’UNFPA afin de réduire les grossesses adolescentes dans la région grâce au développement d’actions clés telles que l’éducation complète à la sexualité, l’amélioration de la convivialité des centres de santé pour les adolescents et jeunes, l’autonomisation des jeunes… Autre programme phare du FFM, la création et la diffusion de la série télévisée « C’est la vie », première série d’éducation par le divertissement dans la région diffusée sur les chaines nationales ainsi qu’à la radio en français, anglais et langues locales ayant déjà touché  des millions de téléspectateurs et récemment plus de 4 millions d’auditeurs par épisode sur RFI.

Les bons résultats obtenus à travers les sept premières années de mise en œuvre et le plaidoyer conduit par les agences ont permis la poursuite du mécanisme pour un nouveau cycle de 5 ans (2018-2022) pour un montant de 10 million d’euros par an dont 3 million pour l’UNFPA ainsi que l’arrivée du Danemark dans le dispositif. 

Pas un pas sans les jeunes, #25Heures de Dakar

Tout dernièrement la Directrice exécutive de UNFPA a pris part aux 25 heures de Dakar organisés par les jeunes de la région. Il en est issu une forte déclaration pour appeler les leaders politiques à prendre en compte les aspirations de la jeunesse lors du prochain sommet de Niarobi.

Le bureau régional a d’ailleurs procédé à la documentation de son expérience dans la gestion des partenariats lors des 5 années passées à travers un ouvrage intitulé « Goal 17 ; Le Partenariat : Une démarche privilégiée de l’UNFPA dans la transformation de l’Afrique et du Monde »

voir l’article

La santé des femmes au coeur du sommet sur la population

La santé des femmes au coeur du sommet sur la population

DW

 

La Conférence mondiale sur la population à Nairobi a pour ambition de faire bouger les lignes en matière de santé et notamment de reproduction.

Dans le monde entier, des millions de personnes ne peuvent toujours pas disposer librement de leur propre corps, choisir leur partenaire et opter pour une méthode de planification familiale. Une situation qui concerne surtout les femmes. La Conférence mondiale sur la population qui a démarré ce mardi 12 novembre à Nairobi souhaite ainsi donner de nouvelles impulsions pour améliorer la situation d’ici 2030. Des experts de la santé, des responsables gouvernementaux et des acteurs politiques de plus de 160 pays se rassemblent pour faire le point sur les 25 dernières années.

Parler pour parvenir au changement

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), plus de 800 femmes enceintes meurent chaque jour dans le monde de maladies évitables, environ 90 millions de femmes tombent enceintes involontairement et une femme sur trois a subi des violences physiques ou sexuelles.

Dans le monde, certaines femmes ne peuvent pas décider quand, où et avec qui elles veulent avoir un enfant

Une situation qui ne laisse pas insensible Renate Bähr, directrice générale de la Fondation allemande pour la population mondiale. Il faut selon elle parler des ces sujets, « plus importants que jamais« . Et d’insister : « Le droit des femmes à l’autodétermination n’est pas encore une réalité : il reste encore plus de 200 millions de femmes qui ne peuvent pas décider quand, où et avec qui elles veulent avoir un enfant« .

Engagements du passé non tenus

Des jalons avaient pourtant été posés lors de la dernière Conférence mondiale sur la population, qui s’est tenue au Caire en 1994. Le programme d’action adopté par 179 États avait déclaré que les droits de la femme et l’égalité de droits sont essentiels au développement durable dans le monde. Mais les objectifs du Caire n’ont été que partiellement atteints.

Une situation que déplore Naisola Likimani du mouvement international des femmes « She Decides » : « Il y a toujours 25 millions d’avortements non médicalisés chaque année. Des filles sont encore mariées avant l’âge de 18 ans chaque année. La communauté internationale a donc décidé que le moment était bien choisi pour se réunir, partager les meilleures pratiques et s’engager de nouveau à changer cela une fois pour toutes« , estime-t-elle.

Les questions liées à la planification familiale restent tabous dans certains pays

Dans un monde où les questions liées à la contraception ou à l’avortement divisent encore, Arthur Erker du Fonds mondial pour la population (FNUAP) attire lui l’attention sur les obstacles toujours présents.  « Il y a sans aucun doute des voix qui veulent revenir en arrière, mais nous devons nous concentrer sur le soutien considérable dont bénéficie cet agenda« .

Selon Arthur Erker, les 17 objectifs de développement durable des Nations unies ne peuvent être atteints que si ceux de la conférence de Nairobi le sont.

Plusieurs thèmes au programme

La rencontre de Nairobi abordera des thèmes comme l’accès général à la santé et aux droits sexuels et reproductifs, ou la fin des violences sexistes et des pratiques dangereuses, telles que les mutilations génitales féminines. Il sera également question de démographique pour renforcer la croissance économique.

Selon @mabinguengom1, la Conférence internationale sur la population et le développement de Nairobi se présente comme « une occasion pour les jeunes qui sont nés après 1994 de se mobiliser pour réaliser les promesses faites au Caire ». @UNFPA_WCARO @eugene_kongnyuy

D’ici le milieu du siècle, 2,5 milliards de personnes vivront sur le continent africain. Cependant, les taux de natalité sont actuellement en baisse dans certains pays, notamment en Afrique de l’Est. En revanche, on ne constate pas de progrès notables dans la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale, où le taux de natalité dépasse en moyenne cinq enfants par femme.

voir l’article

Un forum sur la revitalisation des soins de santé primaires

Un forum sur la revitalisation des soins de santé primaires

Jeune Afrique

 

Le forum régional sur la santé communautaire dans le cadre des soins de santé primaire a démarré à Cotonou, le mardi 12 novembre 2019 et prendra fin le vendredi 15 novembre 2019. Entre autres activités au programme, il y a la session ministérielle qui a eu lieu le mercredi 13 novembre 2019.

Les ministres en charge de la santé du Bénin, professeur Benjamin Hounkpatin, son homologue du Libéria, docteur WilWilhelmena Jallah, et les représentants de ceux de plusieurs autres Etats ont planché sur la thématique du ‘’renforcement des systèmes de santé communautaires pour obtenir des résultats clés pour les enfants dans le contexte de la revitalisation des soins de santé primaires’’, mercredi dernier à l’hôtel Azalai.

Pour le directeur régional adjoint Afrique de l’ouest et du centre de l’Unicef, Gilles Fagninou, l’opportunité de cette session ministérielle trouve sa justification dans les statistiques disponibles. « L’Afrique de l’ouest et du centre représentent 11% des enfants du monde mais affichent 31 % des décès des enfants de moins de 5 ans…

voir l’article complet

La mondialisation change la manière d’envisager la maladie et la qualité des soins

La mondialisation change la manière d’envisager la maladie et la qualité des soins

Le Monde

 

L’Afrique, ses mères et ses enfants en ont assez de souffrir à l’hôpital. Pour Yannick Jaffré, anthropologue spécialiste des questions de santé en Afrique, il faut agir sur « la situation des soignants si l’on veut améliorer celle des enfants ».

Yannick Jaffré a fait de l’analyse des systèmes de santé « le combat d’une vie ». Depuis une trentaine d’années, l’anthropologue, directeur de recherche émérite au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) sillonne l’Afrique de l’Ouest, où il a notamment enseigné à la faculté de médecine de Bamako.

Ses travaux portent sur les déterminants sociaux de la santé et l’amènent à pointer les indicateurs qui feront baisser la mortalité maternelle, la malnutrition, ou peuvent améliorer la santé psychologique. Avec Enfants et soins en pédiatrie en Afrique de l’Ouest (éd. Karthala, 364 pages, 25 euros), il observe comment la demande de qualité des soins qui émerge oblige à repenser l’acte thérapeutique en lui-même.

Pourquoi la demande sociale d’une meilleure qualité de soins de la mère et l’enfant émerge-t-elle ?

Yannick Jaffré Depuis quelques années, en Afrique, se dessine un changement de statut de l’enfant. Il a désormais une réelle existence sociale. On lui donne la parole, en plus d’investir pour son avenir. Ainsi, les professionnels de santé, qui sont eux aussi parents, portent davantage d’attention à sa plainte. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la demande de qualité des soins émane d’abord des praticiens en pédiatrie. Ces derniers dénoncent la précarité de leur environnement de travail, le déficit d’équipements, de médicaments et de personnels, ou encore les facteurs socio-économiques qui conditionnent l’accès aux soins et les empêchent ainsi de bien faire leur travail. Cela crée une souffrance chez eux. C’est ce qui explique qu’il est impossible d’améliorer la situation des enfants si l’on ne change pas celle des soignants.

La faible prise en compte de la douleur de l’enfant observée jusqu’ici dans certains services de santé a-t-elle pour seule explication la précarité des hôpitaux ?

Il existe bien sûr des abus flagrants liés à la désinvolture ou à l’incompétence. Mais l’environnement pèse sur les soignants. Même si ces derniers sont formés à une médecine clinique mondialisée, que peuvent-ils faire quand un scanner est nécessaire et que l’appareil est indisponible, ou quand il n’y a pas de thermomètre et qu’il faut obliger les familles à aller en acheter un, sachant que celles-ci n’en ont pas toujours les moyens ?

L’Afrique a encore un taux de mortalité infantile élevé. L’hôpital a-t-il appris à accompagner les enfants et adolescents vers la mort ?

La mort de l’enfant à l’hôpital des suites d’une maladie chronique ou d’une pathologie lourde est un phénomène relativement nouveau. Il y a encore quelques années, les enfants mouraient à l’hôpital plutôt de fièvre, de paludisme, de malnutrition, de diarrhées ou de choléra. Ce sont des décès rapides, et les personnels de santé qui n’avaient pas eu le temps de tisser de liens avec ces enfants n’avaient donc pas, d’une certaine façon, à « gérer » leur mort.

Le problème qui se pose désormais, notamment en oncologie, c’est qu’il y a un attachement des équipes médicales à leurs patients, comme partout où il existe des pathologies chroniques qui durent. Quand la mort survient, c’est extrêmement douloureux pour elles, sachant qu’elles ont été confrontées, tout le long de la maladie, à un problème dans la prise en charge de la douleur : elles manquent de produits et, souvent, de formation dans l’utilisation de la morphine, par exemple. Ces questions, qui sont à l’articulation de la clinique, de l’anthropologie et de l’éthique, doivent être mises en lumière dans des politiques publiques et être traitées dans les cursus médicaux et paramédicaux.

Qu’est-ce que cette nouvelle approche du malade révèle des mutations à l’œuvre en Afrique subsaharienne ?

L’urbanisation, la mondialisation et une plus grande circulation des émotions changent la manière d’envisager la maladie et les soins. Ces mutations sociales conduisent les populations à exiger une offre de santé qui corresponde à leurs attentes. Elles ne sont plus dans l’obéissance absolue et la soumission envers la médecine ou les médecins, mais plutôt dans un processus de revendication d’un droit à la parole pour les femmes et pour les enfants. C’est un mouvement anthropologique de fond porteur de beaucoup d’espoir, capable de transformer la prise en charge hospitalière sur le continent.

Dossier réalisé en partenariat avec le Fonds français Muskoka.

voir l’article

Le manque de couveuses, les sous-effectifs dans les hôpitaux publics et les négligences aggravent la mortalité infantile au Cameroun

Le manque de couveuses, les sous-effectifs dans les hôpitaux publics et les négligences aggravent la mortalité infantile au Cameroun

Le Monde

 

L’Afrique, ses mères et ses enfants en ont assez de souffrir à l’hôpital.« Ce sont les défaillances qui ont tué mes quatre bébés »

Les photos des cinq nouveau-nés dans une couveuse défilent sur le smartphone. Annie Chendjou pointe une petite tête aux cheveux noirs. « Voici la seule survivante. » Assise sur un banc dans le service de néonatalogie de l’hôpital régional de ­Bafoussam, dans l’ouest du Cameroun, la trentenaire est encore en état de choc. Le 10 août, cette jeune maman met au monde des quintuplés, dont « quatre décèdent tour à tour en moins d’un mois », poursuit-elle, les yeux lavés par les larmes.

Pourtant, la perspective de donner le jour à cinq enfants les avait ravis, elle et son mari, Félix Tchoumo Denkeng. « Une bénédiction », se souviennent-ils. Pour éviter tout risque, Annie est allée à l’hôpital de Bafoussam, le meilleur de la région, où, après trente semaines de grossesse, elle donne naissance à trois filles et deux garçons, « tout petits, mais en bonne santé », jure le père, qui ne comprend toujours pas pourquoi, quelques heures après l’accouchement, un premier bébé est mort.

Calvaire

Quelques jours plus tard, la santé d’un deuxième se dégrade et nécessite une transfusion sanguine. Mais le nourrisson décède à son tour, saignant du nez et de la bouche. Apeurés, les parents demandent leur transfert à Yaoundé, la capitale, dans une formation hospitalière plus compétente. Mais l’hôpital refuse, arguant qu’il « n’est pas dépassé »Pourtant, deux autres bébés décèdent en moins de deux semaines.

« Le jour du décès du quatrième, si j’avais eu une arme, j’aurais tué au moins trois infirmières. J’étais tellement en colère ! », raconte Félix, qui s’est endetté de 2 millions de francs CFA (3 048 euros) pour sauver ses petits. De peur de perdre sa dernière fille, il alerte les médias. L’affaire fait scandale au point que le ministre de la santé annonce l’ouverture d’une enquête et dépêche une équipe sur place. Mais, deux mois plus tard, le mystère de ces morts n’est pas éclairci.

Le père accuse : « C’est la négligence des infirmières et la défaillance des couveuses qui ne chauffaient pas qui ont tué mes quatre enfants. » Au service de néonatalogie, le personnel médical est en effet insuffisant, et c’est à la famille qu’il revient de nourrir les grands prématurés.

Côté administration, le professeur George Enow Orock, nouveau directeur de l’hôpital, n’a pas souhaité s’exprimer, mais la responsable du service de néonatologie, Clémentine Kouene, estime que « tout le monde s’est mobilisé », que « les nouveau-nés ont reçu tous les traitements possibles ». Assurant qu’« il n’y a pas eu de défaillance », les bébés auraient, selon elle, succombé à une infection.

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la moitié des grands prématurés meurt en raison d’un manque de soins adaptés. Une faille dans le maintien de la température, l’allaitement ou les soins de base pour traiter infections et problèmes respiratoires peuvent être fatals. Un médecin de l’hôpital, « fatigué des critiques de ceux qui ne vivent pas notre calvaire », rappelle, sous couvert d’anonymat, que « tous les hôpitaux publics du Cameroun manquent de matériel. Ce qui donne l’impression que les prématurés sont dans l’attente d’une mort programmée ». Il précise que, sur la quinzaine de couveuses disponibles dans l’hôpital de Bafoussam, seules sept sont fonctionnelles. Dans les trois régions du Nord, il n’y a que huit couveuses pour plus de 7 millions d’habitants.

« Petite survivante »

Nellie aussi a perdu son neveu quelques jours après sa naissance à l’hôpital régional de Bafoussam, au début de l’année. Là encore, l’état de la couveuse est en question. Nellie raconte, encore frissonnante, qu’il fallait faire bouillir de l’eau, remplir des bouteilles et les placer de part et d’autre de la couveuse pour la réchauffer.

Face à cette pénurie, de nombreux experts conseillent la méthode « Kangourou », qui veut que la mère garde son bébé sur elle et lui transmette sa chaleur. Serge Armel Njidjou, de l’Agence universitaire pour l’innovation technologique, a quant à lui mis sur pied une couveuse néonatale interactive, connectée au smartphone du médecin pour un suivi à distance. Après une phase d’expérimentation, il devrait passer bientôt à la fabrication en série. Mais déjà, « dans la panique, des gens m’appellent pour acheter la couveuse à titre privé afin de sauver leur bébé ». L’inventeur reste démuni face à cette souffrance, mais travaille d’arrache-pied pour équiper rapidement les hôpitaux.

Assise en tailleur sur son lit de maternité, Annie écoute de la musique religieuse et prie chaque jour, terrassée par le quadruple deuil. Son « ultime espoir » est de rentrer chez elle avec sa fille, Marie-Reine, « saine et sauve ». Pour cela, « la petite survivante » doit passer la barre des 2 kg. Plus que 350 g et Annie pourra à nouveau respirer.

Dossier réalisé en partenariat avec le Fonds français Muskoka.

voir l’article

Labelliser les maternités pour améliorer le traitement des femmes africaines

Labelliser les maternités pour améliorer le traitement des femmes africaines

Le Monde

 

L’Afrique, ses mères et ses enfants en ont assez de souffrir à l’hôpital. Le forum de l’Unicef et du Fonds Muskoka conclut que la réduction de la mortalité des femmes en couche est possible en Afrique.

« Durant les trois jours de forum, 1 125 femmes auront donné la vie en perdant la leur et 4 833 nouveau-nés décéderont en Afrique de l’Ouest et du centre… » A Dakar, l’heure du bilan a sonné. A l’issue de l’événement sur l’expérience des soins maternels organisé par l’Unicef et le Fonds français Muskoka, des solutions concrètes ont été listées pour faire baisser drastiquement les mortalités maternelle et infantile dues aux mauvais traitements.

Effrayants, les chiffres rappelés par le docteur Alain Prual, organisateur de l’événement, suffisent à rappeler l’urgence de mettre en place des solutions concrètes. Et pas seulement d’apporter des réponses quantitatives. Dans certains pays de la région, 90 % des femmes accouchent dans une maternité mais, dans ces lieux, la qualité du soin n’est pas au rendez-vous. « Ces vies perdues sont d’autant plus inacceptables, intolérables, que dans leur grande majorité, elles pourraient être évitées par des interventions efficaces à haut impact, souvent peu coûteuses », se désole Alain Prual, conseiller en santé maternelle et néonatale au bureau régional de l’Unicef en Afrique de l’Ouest et du centre.

Marie Soulié, spécialiste des programmes de santé maternelle et infantile au Fonds des Nations-unies pour la population (Unfpa), choisit une image musicale pour expliquer le cœur du problème : « Avoir le personnel, le matériel et les intrants, c’est une condition nécessaire pour créer une mélodie sanitaire, mais c’est insuffisant. Il faut un chef d’orchestre pour mettre du liant, mieux organiser les services, favoriser le dialogue entre les communautés et les hommes politiques, pour faire respecter le droit des femmes. » Une table d’accouchement plus confortable ne suffit pas à changer l’expérience vécue lors de ce moment à hauts risques. La femme doit y être bien installée, y être écoutée.

Des critères de qualité adaptés

Pour apporter rapidement une meilleure offre de soins, des idées d’actions concrètes ont émergé au terme de la réflexion. « Il faut permettre aux Etats de mettre en place des mécanismes d’accréditation des maternités sur la base de critères objectifs et mesurables », propose Alain Prual. En 2016, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Unicef ont défini les « standards pour l’amélioration de la qualité des soins maternels et néonatals dans les établissements de santé ». Mais sans suivi sur le long terme, les standards se sont vite affaissés. « Pendant mes recherches, j’ai vu des centres se targuer d’être “femmes friendly”. Mais en réalité, dès que le médecin chef qui avait impulsé la dynamique a été remplacé, les critères n’ont plus été respectés et le logo est resté », se souvient Marie Soulié.

Ce qu’il faut faire, ce qu’il ne faut pas faire… Les schémas sont faciles à dessiner, mais souvent peu adaptés, chaque pays de la région ayant ses propres spécificités. Pour un anthropologue comme Yannick Jaffré, qui a beaucoup travaillé en Afrique de l’Ouest, entre les schémas globaux et la réalité du terrain, l’écart est en effet « énorme »« Ne faudrait-il pas partir de la description fine de la situation de chaque pays, questionne le directeur de recherche émérite au CNRS, pour apporter des réponses adaptées à chacun ? Des éléments comme le fait qu’ici le chef infirmier change tous les trois mois, ou qu’ailleurs les meilleurs médecins préfèrent travailler en clinique pour gagner plus d’argent. »

Rôle de la société civile

En Tanzanie par exemple, une ONG américaine a demandé aux populations, aux autorités locales et aux professionnels de définir leurs propres critères de qualité en ce qui concerne le respect, la dignité et l’équité. A partir de ce travail, les groupes ont pu ensemble s’accorder sur des critères communs de qualité de l’expérience des soins.

Tous les participants du forum se sont accordé une chose : le rôle de la société civile est fondamental. Les ONG locales ont un important rôle de plaidoyer à jouer pour faire entendre les droits des femmes aux politiques, mais aussi et surtout aux femmes elles-mêmes. Pour cela, le modèle de l’« observatoire citoyen » a déjà fait ses preuves. Au Burkina Faso, l’ONG locale RAME (Réseau accès aux médicaments essentiels) a mis en place l’Observatoire citoyen sur l’accès aux services de santé (Ocass). Grâce à la veille communautaire, des éléments de dysfonctionnement précis des services de santé ont été collectés, et les autorités alertées.­­

Le problème reste que les ONG locales sont souvent trop faibles. « Depuis vingt ans que je travaille pour établir un dialogue, je n’ai jamais réussi parce que personne n’a les moyens de s’engager vraiment, explique le docteur Alain Prual, réaliste. Dans le cadre des Fonds français Muskoka, il y a une responsabilité à appuyer la société civile pour mettre en place ces observatoires. »

Dossier réalisé en partenariat avec le Fonds français Muskoka.

voir l’article

L’Afrique de l’Ouest adopte une Charte des soins de maternité respectueux

L’Afrique de l’Ouest adopte une Charte des soins de maternité respectueux

Le Monde

 

L’Afrique, ses mères et ses enfants en ont assez de souffrir à l’hôpital. Faire de la qualité des soins pour les femmes dans les maternités un droit.

Certes, ce n’est pas une convention, mais une charte. Pourtant, c’est un grand pas en avant qui a été fait avec l’adoption d’une Charte des soins de maternité respectueux lors du forum régional africain sur l’expérience des soins qui s’est déroulé à Dakar sous l’égide de plusieurs agences de l’ONU.

Caroline Maposhere, infirmière sage-femme membre du conseil d’administration de l’ONG White Ribbon Alliance (WRA), a ainsi été entendue lorsqu’elle rappelait que « les femmes ne demandent pas le luxe, mais ce qu’il y a de plus élémentaire pour le respect de leur dignité ». Devant chercheurs et représentants de la société civile de quinze pays d’Afrique de l’Ouest et du centre, la Zimbabwéenne avait lancé un « J’appelle à une révolution » après que l’assemblée eut fait le constat que, partout dans le monde, les femmes souffrent de maltraitance et de violences lors de leur accouchement.

Ce mercredi 23 octobre restera donc dans l’histoire comme jour d’adoption d’une Charte des soins de maternité respectueux. Enfin, à condition que le texte vive… Car, en 2010 déjà, l’USAID International publiait un état de la situation et révélait une réelle pandémie dans tous les pays du monde. Or, depuis les choses n’ont pas vraiment changé.

Alain Prual, organisateur du forum, se souvient aussi avoir participé à la publication d’une charte du droit des patients, réalisée avec le gouvernement du Niger en 1992 et lancée devant toutes les télévisions. « Je l’ai retrouvé dernièrement dans mon garage. C’est fou de se dire que ce sujet extrêmement important a été oublié, mis au placard pendant tant de temps », précise-t-il.

Plus une notion abstraite

Alors, il existe encore cette femme en Côte d’Ivoire qui refuse d’aller accoucher à l’hôpital parce qu’elle a peur d’être battue par la sage-femme. Cette Kényane, qui reste coincée dans l’hôpital parce qu’elle n’a pas de quoi payer les frais de son accouchement, et qui préférerait être en prison plutôt qu’ici, où on lui rappelle son crime d’être pauvre.

Ces situations et bien d’autres sont extrêmement répandues, et pas seulement en Afrique. « What Women Want » (« ce que les femmes veulent »), la dernière étude réalisée par la WRA et ses partenaires auprès de près de deux millions de femmes à travers le monde, a de nouveau montré l’étendue du problème. Aussi, par cette charte, la qualité des soins n’est plus une notion abstraite, elle devient un droit.

A l’accouchement, droit pour les femmes à la protection et à l’intégrité ; droit à l’information et au consentement ; droit à la confidentialité, à la dignité et au respect ; droit à l’absence de discrimination ; droit aux soins de santé, à la liberté ; droit à l’alimentation et à l’eau propre. Pour les nouveau-nés, droit d’être avec ses parents et droit à une identité. Dix articles pour autant de droits universels qui sont loin d’être respectés partout dans le monde.

« Un outil de plaidoyer »

« Une charte est moins puissante qu’un accord international car on ne demande pas aux pays de la signer, explique Luc de Bernis, spécialiste des questions de santé maternelle auprès de l’OMS et de plusieurs ONG internationales. Pourtant, ce texte « donne aux femmes un document de référence pour se défendre. Elle définit un cadre et c’est comme cela que le droit avance », affirme-t-il. La Charte des soins de maternité respectueux repose sur des normes incluses dans toutes les conventions en matière de droits humains, elles-mêmes ratifiées par la plupart des pays. C’est sa force.

« Elle doit être un outil qui inspire le changement dans les systèmes de santé », poursuit Suzanne Stalls, conseillère technique supérieure à Jhpiego, une ONG américaine qui a activement participé à son écriture. Et si les gouvernements manquent souvent de moyens pour honorer cet enjeu, « la mobilisation ne peut se faire qu’au niveau de la société, intime Blami Dao, directeur technique de Jhpiego en Afrique de l’Ouest et du centre. Des coalitions entre les professionnels, les médias et toute la société civile doivent se saisir de cette charte et l’utiliser comme un outil de plaidoyer ».

Mais le professeur de gynécologie obstétrique est réaliste : « La mise en œuvre de soins qui respectent les femmes ne peut pas se faire autour de ce seul élément. » Seule une action concrète fera bouger les lignes. « Il faut aller voir les maçons et les architectes et les faire travailler sur le design des salles d’accouchement en créant des box. C’est la base pour que des soins de qualité et humanisés soient possibles. Sinon, les dix articles de la charte seront certes affichés dans toutes les maternités, mais oubliés », précise-t-il. Rendez-vous demain.

Dossier réalisé en partenariat avec le Fonds français Muskoka.

voir l’article

Tradition et manque de formation des sages-femmes, deux clés des violences de l’accouchement

Tradition et manque de formation des sages-femmes, deux clés des violences de l’accouchement

Le Monde

 

L’Afrique, ses mères et ses enfants en ont assez de souffrir à l’hôpital . Florence-Marie Sarr Ndiaye, sage-femme depuis trente-cinq ans au Sénégal, invite à s’intéresser au vécu du personnel soignant des maternités.

« J’ai pu avoir des gestes violents, j’ai pu dire des choses qu’on appelle aujourd’hui violence verbale, mais cela n’avait rien d’intentionnel. » En 2020, Florence-Marie Sarr Ndiaye se retirera des salles d’accouchement. L’heure de sa retraite va sonner et en trente-cinq ans de carrière auprès des femmes de Popenguine, une localité située au bord de la mer au Sénégal, à 70 kilomètres au sud de Dakar, la sage-femme « de classe exceptionnelle », comme on appelle les plus expérimentées du pays, a vu son métier se métamorphoser et même si, à chaque réveil, elle avoue encore aujourd’hui « prier pour rencontrer des situations que je pourrai gérer ».

Pour Florence-Marie, qui ne veut pas excuser les pratiques brutales mais les expliquer, il s’agit de replacer gestes et mots dans leur contexte socioculturel. « Aujourd’hui, on nous parle de droits des femmes, de droits des enfants. Mais lorsque j’ai commencé, ni les patientes ni les soignants n’en étaient avisés », se désole-t-elle. Lorsqu’elle raconte les scènes d’accouchement, elle reconnaît qu’elles peuvent rétrospectivement sembler violentes. Mais l’étaient-elles vraiment ?

Quand elle se lance dans la profession, à 24 ans, dans une petite maternité rurale, elle est seule à la barre, aidée de quelques matrones. A sa salle d’accouchement, minuscule, s’ajoute juste un petit local de consultation. Maintenant, ce centre est devenu plus important et elle applaudit ce changement. Mais en écoutant les chercheurs présents au forum de Dakar sur l’expérience des soins maternels (qui se déroule du 21 au 23 octobre), dénoncer les violences subies par les femmes à l’accouchement, elle veut faire entendre sa voix. Celle des soignants en général.

Hantise de côtoyer la mort

« Dans notre culture, une femme ne doit pas pleurer quand elle accouche. C’est une question d’honneur, pour elle et pour sa famille », soutient la presque sexagénaire. A l’extérieur de la petite maternité, la belle-famille tend l’oreille. Un pleur, un cri, et l’information est relayée au village et c’est l’opprobre assuré. Elle-même est fière d’avoir donné la vie à quatre reprises sans une larme. « Ce moment est le passage du statut de jeune fille au statut de femme, dans la douleur, mais avec honneur », indique-t-elle, en appuyant chaque mot.

Difficile dans cet environnement de se départir de sa culture pour n’être qu’un agent professionnel : « En tant que sage-femme, je dis maintenant à une femme qu’elle peut pleurer. Mais, avant, en tant que femme imprégnée de la culture de mon pays, je répétais à la future maman de se calmer, de se taire. » Une violence verbale, selon la définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

En plus du poids de cette tradition, le manque de moyens et de formation peut conduire à des gestes répréhensibles. Et la professionnelle de se souvenir de cet accouchement où une femme, se tordant de douleur, refuse de continuer à pousser alors que l’enfant est coincé dans son périnée. « Nous avons dû frapper la dame pour qu’elle ouvre ses jambes et qu’elle pousse, raconte-t-elle tristement. Car nous n’étions pas formées à la réanimation du nouveau-né et savions que, s’il restait coincé à ce niveau, il ne survivrait pas. » Hantise de voir une femme perdre son enfant au stade ultime, hantise de recueillir un mort-né, hantise de côtoyer la mort. Violence physique.

La sage-femme en fin de carrière reconnaît ses erreurs, reconnaît que sa « culture » traditionnelle n’a pas toujours été bonne conseillère. Mais les femmes qui la voient arriver dans la salle d’accouchement, aujourd’hui encore, trouvent dans la douceur de ses yeux et la franchise de son sourire une rassurante bienvenue. « Ça, ça me fait dire que je n’ai pas été trop nulle », confie-t-elle modestement.

Sa confession enfin accouchée, les lèvres de Florence-Marie se pincent et le silence s’installe avant qu’elle n’ajoute finalement. « Toute cette violence qu’on nous impute n’était pas volontaire dans la majorité des cas. Nous n’avions qu’un but : la vie. Mais il fallait faire avec les moyens du bord. »

Des maternités qui s’équipent

Or les moyens du bord, ce n’était presque rien. Ne pas être dans des conditions favorables à la bonne conduite d’un accouchement a été le quotidien de Florence-Marie durant toute sa carrière. Et c’est toujours celui de beaucoup de professionnels dans les maternités rurales sénégalaises et plus largement en Afrique de l’Ouest. Le centre où elle travaille est équipé d’aspirateurs nasaux pour les nouveau-nés. Mais avant, il fallait déboucher les voies respiratoires à la bouche, avec tout ce que cela comporte de contaminations. « Combien d’entre nous ont été infectées par l’hépatite B parce que nous n’étions pas protégées ? N’est-ce pas aussi une forme de violence ?, questionne-t-elle. Et lors d’une fausse couche, où nous devions aller chercher les débris dans l’utérus avec les doigts, car nous n’avions pas d’autre moyen de le faire… »

Florence-Marie est soulagée de voir que si tout n’est pas parfait, les outils se multiplient dans les maternités du pays. Et ce qui la rassure plus encore, ce sont les nouvelles formations des sages-femmes. La révision du curriculum proposée par l’OMS préconise ainsi l’apprentissage des soins obstétricaux d’urgence de base comme la césarienne ou l’utilisation de la ventouse. Des pratiques qui semblent basiques, mais que Florence-Marie a dû apprendre sur le tard.

Malgré la conscience d’avoir parfois agi de manière répréhensible dans un contexte particulier, Florence-Marie reste sereine car elle a toujours respecté la ligne de conduite qu’elle s’était fixée : « L’amour, l’engagement et la détermination », les trois maîtres mots de sa vie professionnelle. Et de sa vie.

Dossier réalisé en partenariat avec le Fonds français Muskoka.

voir l’article